L’élection des dirigeants en entreprise

bulletin glissé dans l'urne

Les entreprises auraient-elles de meilleurs dirigeants si les employés les élisaient ?

Il y aurait comme le souffle d’une demande de coopération dans la vie économique. Nous avons pu l’observer récemment aux États-Unis, précurseurs de ce qui finit par survenir ici : Les actionnaires d’Open AI ont chassé le dirigeant fondateur puis l’ont rappelé, car les employés ont exigé qu’il revienne au motif qu’il était bon! Apple s’est séparé au contraire d’un de ses « top managers » parce qu’il y eut un soulèvement des salariés après son embauche. Il avait tenu des propos déplacés sur les femmes des années auparavant.

Élire le dirigeant est un choix qui implique une plus grande complexité dans les organisations concernées que dans celles qui n’ont pas cette pratique. Ce n’est certainement pas parce que ce serait plus facile qu’on déciderait de passer à ce mode de nomination. C’est une forme de gestion bien plus difficile, témoignent les dirigeants, car c’est une mécanique très exigeante. Elle soulève, tout d’abord, une ambiguïté à lever autour de la notion de hiérarchie or, élire le dirigeant n’empêche en rien l’existence d’une hiérarchie, de strates de responsabilités. Si l’on élit le dirigeant c’est bien pour qu’il dirige. Elle exige des candidats souhaitant être élus des spécificités de tempérament : la patience, l’écoute, la capacité à expliquer sans chercher à convaincre, la capacité de reformulation, la ductilité, la souplesse, la sincérité, la mémoire.

C’est toutefois la seule formule qui prévient l’écueil de la tour d’ivoire, de la solitude qui peut virer à l’isolement, car le dirigeant est constamment à devoir rapporter ce qu’il fait sous des formes nombreuses et variées. Il vérifie constamment qu’il dispose de l’assentiment, que son mandat est porté par la cohésion d’un ensemble, ensemble qui est par nature hétérogène, difficile, composite.
Est-ce un système farfelu ? Ça pourrait peut-être paraître étrange à des salariés d’aller voter pour élire le PDG. Mais c’est la réalité de millions de salariés dans le monde depuis très longtemps et il y a de très grandes entreprises coopératives en France dont le « board » des dirigeants est élu : comme au Crédit Agricole, BPCE, le groupe Avril par exemple.

 

Un levier de réussite collective 

La nécessité à mener une campagne pour occuper un poste, oblige le candidat à aller à la rencontre de ceux qu’il souhaite continuer à diriger ou qu’il compte diriger, à élaborer une stratégie, à la formuler, à la présenter, à la discuter, à l’enrichir. Dans les entreprises à la déjà longue tradition démocratique, et aussi lorsque les dirigeants sont déjà connus et briguent un nouveau mandat, la campagne est continue, elle a lieu tous les jours. Sous les formes les plus diverses, l’assentiment est testé, les mécontentements sont écoutés, analysés et traités, les avis sont récoltés, la stratégie est discutée et ajustée. La démocratie s’est alors infusée à tel point qu’il est possible de ne plus s’en rendre compte. Cette pratique produit de nombreux effets en termes de cohésion d’entreprise, car chacun aura pu contribuer depuis sa place. Elle invite les candidats et futurs dirigeants à retravailler leur point de vue, à élargir leurs horizons, à y insérer le regard des membres des équipes, à considérer autrement certaines problématiques, à en découvrir d’autres, à tenir compte de ce qui lui est confié et à s’engager. Par conséquent, ils n’orientent plus seulement leur stratégie sur les seuls indicateurs de la santé économique et de l’efficacité, stratégie qu’ils auraient formulé tout seul dans leur coin avec un ou deux conseillers confidentiels.

 

L’élection invite à une adhésion du plus grand nombre de collaborateurs, adhésion qui permet d’entraîner ; elle est donc un levier de la réussite collective.
La parole en mouvement dans une entreprise provoque une solide cohésion, de la satisfaction qui sont la source vive de la réussite économique de l’entreprise et ainsi de sa pérennité.

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